Mise à jour juin 2024
Pour fin de lecture, les chiffres encerclés réfèrent aux numéros des références annexées au présent document.

Avez-vous déjà entendu parler ou lu sur ce sujet? Si vous souffrez du syndrome de l’intestin irritable SII, avez des symptômes intestinaux non diagnostiqués ou des ballonnements au quotidien, il y a de fortes chances que ce terme vous soit familier, quoi qu’encore il est assez peu connu au sein des communautés de professionnels de la santé qui n’œuvrent pas ou peu dans le domaine de la santé digestive.

Le SIBO est l’abréviation pour SmallIntestinalBacterialOvergrowth (4). Il s’agit d’une pullulation bactérienne à l’intestin grêle qui apporte un ensemble de symptômes non spécifiques de nature majoritairement digestive (3)(4)(5). Cet article vous permettra d’avoir une vue d’ensemble et détaillée des informations importantes à considérer dans un contexte de SIBO.

En termes simples, en contexte de SIBO, il y a trop de bactéries à un endroit dans l’intestin grêle qui ne devrait pas en contenir autant (4)(5)(11). Ces bactéries, de type protéobactéries à gram négatif, sont capables de produire des gaz par fermentation ce qui entraîne évidemment beaucoup de symptômes (3)(4)(5)(7)(8)(10)(11) :

  • Ballonnements abdominaux sévères;
  • Distension abdominale/douleurs abdominales;
  • Gaz intestinaux, éructations (« rots »);
  • Nausées, vomissements;
  • Diarrhée;
  • Constipation;
  • Fatigue/brain fog ou brouillard mental.

Ces symptômes ressemblent à ceux du syndrome de l’intestin irritable (SII)(4)(7). Selon les données actuelles, jusqu’à 2/3 des gens atteints de SII seraient également atteints du SIBO (4)(10). Le tronc commun de ces deux problématiques est une dysbiose ou un déséquilibre du microbiote intestinal, une augmentation de la perméabilité intestinale communément appelée leaky gut, en plus de la présence d’une inflammation chronique (7)(10).

Non seulement le SIBO est difficile à diagnostiquer, mais également laborieux à traiter (4). De surcroît, il y a un manque de consensus médical sur les démarches à suivre (4).

En principe, pour le diagnostic, on ferait une aspiration du liquide au niveau du duodénum ou jéjunum (début de l’intestin grêle) et on analyserait ce liquide en termes de quantité de bactéries (3)(4)(8). Si sa concentration est de plus de 103 UFC/ml, un diagnostic de SIBO est fait (3)(4). Dans les faits, cette mesure est coûteuse, invasive et sujette aux contaminations lors du prélèvement (3)(4)(8). Mise à part dans certains protocoles de recherche, l’accessibilité à ce test est extrêmement limitée (4).

À ce jour, le test respiratoire ou Breath test est utilisé (3)(4). Avec celui-ci on mesure les niveaux de gaz (hydrogène, méthane, sulfure d’hydrogène) expirés avant et après l’ingestion de glucose ou lactulose (3)(4)(8). Ce test se base sur le fait qu’à part le CO2, les cellules humaines ne produisent pas de méthane, d’hydrogène ou de sulfure d’hydrogène (3). Ce sont les bactéries (ou les archées pour le méthane) qui les produisent à la suite d’une fermentation (3)(4). Conséquemment, plus il y a de ces gaz expirés par la bouche à la suite de l’ingestion de ces sucres, plus on pourrait penser qu’il y a une surcroissance bactérienne au niveau de l’intestin grêle (4). Ce test est donc simple, sécuritaire et non-invasif (3)(4).

Malheureusement, à ce jour, les tests respiratoires sont peu fiables, c’est-à-dire que leur niveau de sensibilité et de spécificité sont faibles (4)(11). On a donc souvent des « faux positifs », c’est-à-dire des SIBO qui seraient identifiés sans que ce soit réellement le cas (4). Il faut noter que cela reste tout de même le seul test à ce jour disponible et proposé dans les lignes directrices de certaines associations médicales dont l’American College of Gastroenterolgy (4). L’expérience clinique devient alors un atout essentiel pour aider les gens qui souffrent de cette problématique, afin de les guider vers la bonne option et les bons professionnels pour les soutenir dans leur démarche.

Quelques indicateurs et symptômes sont associés à un risque supérieur de SIBO, sans pour autant être un lien de cause à effet (4)(6)(8)(10)(11) :

  • Âge avancé et sexe féminin;
  • Troubles de la motricité intestinale: SII, gastroparésie, dyspepsie fonctionnelle;
  • Dysfonction des nerfs ou des muscles intestinaux;
  • Maladies auto-immunes ou à médiation immunitaire: ex. diabète, maladie cœliaque non traitée, maladies inflammatoires de l’intestin (MII), hypothyroïdie, sclérose en plaques, fibromyalgie;
  • Prise de certains médicaments: opioïdes, anti diarrhéiques, anticholinergiques;
  • Obstruction partielle ou intermittente de l’intestin grêle, altérations chirurgicales du tractus gastro-intestinal: ex. chirurgie bariatrique;
  • Diverticules de l’intestin grêle, sténose, fistule;
  • Une faible acidité gastrique : ex. d’inhibiteurs de pompe à protons (IPP), âge avancé, consommation régulière d’antiacides.

Concernant ce dernier point, il est reconnu que l’acidité gastrique joue un rôle important dans la prévention de la surcroissance des bactéries dans le tractus digestif haut (4).

Les inhibiteurs de pompe à protons (IPP) de type Pantoloc/Dexilant/Nexium/Prevacid/Losec font partie de votre vie depuis de nombreuses années ? Une étude a démontré que vous avez 3 fois plus de risques de développer un SIBO (4)(6). D’autres études ont observé que la prévalence de SIBO était plus de 50% pour les patients prenant des IPP (11). La sévérité des symptômes semble augmenter avec l’utilisation prolongée (11).Toutefois, il n’est pas possible de déterminer à ce jour la dose, la durée et le type d’exposition qui ont un effet sur ce risque (4)(6).

Sans faire partie intégrante de la démarche diagnostique du SIBO, voici quelques éléments qui peuvent amener le clinicien à se questionner et à pousser sa démarche ou son investigation (4)(5).

Des phrases telles que « je gonfle après un verre d’eau » ou « j’ai l’air enceinte de 5 mois le soir » sont entendues régulièrement en contexte de SIBO. Encore une fois, rien de cela mène vers un diagnostic, mais peut mettre sur la piste.

Une fois le SIBO identifié et diagnostiqué, qu’est-ce qu’on fait?

Idéalement, on traite. Le médecin peut prescrire un antibiotique sur une durée de 14 jours, pour enrayer la prolifération bactérienne (4). Le type d’antibiotiques variera en fonction du type de SIBO (hydrogène ou méthane) et de la symptomatologie du patient (4). Les récidives sont malheureusement très fréquentes (44% dans les 9 mois post-antibiothérapie), surtout si on n’a pas réussi à trouver la réelle cause du SIBO (6). En effet, celui-ci est un symptôme découlant d’un autre problème qui doit être identifié (4).

Encore une fois, le travail en interdisciplinarité prend toute son importance.

Quel est le rôle de la nutrition dans le traitement du SIBO (9)?

  • Gestion des symptômes;
  • Maintien d’une saine relation avec les aliments;
  • Combler les besoins nutritionnels;
  • Corriger les déficiences nutritionnelles, s’il y a lieu.

La nutrition permettrait également d’augmenter la durabilité du traitement d’antibiotiques dans le but d’aider à prévenir les récidives (9).

Le domaine étant assez jeune au plan des données probantes, il n’y a pas de diète spécifique qui a été validée scientifiquement, afin de traiter ou de prévenir le SIBO (2)(4)(8).

Vous lirez ou entendrez des mots tels que Low-fermentation diet, Specific carbohydrate diet, Biphasic diet ou SIBO specific food guide, mais il faut savoir que toutes ces diètes sont basées sur l’expérience clinique patient et n’ont pas encore fait l’objet d’études (4)(5)(8)(9). Est-ce qu’on les discrédite pour autant ? Cela dépend. Le problème est souvent que ces diètes sont très restrictives (9). Résultats : on ne mange presque plus rien et la relation avec la nourriture devient malsaine, la peur de manger et de réagir est également très présente (9). La variété alimentaire diminue peu à peu et on tombe dans un cercle vicieux en devenant encore plus réactif à tout ce que l’on mange (9). Le mieux est évidemment de se faire accompagner par une nutritionniste qui s’y connaît, travaillant en collégialité avec les médecins et gastroentérologues dans ce suivi qui se doit de vous être personnalisé.

La majorité des pistes d’interventions nutritionnelles proviennent de celles réalisées en contexte du syndrome de l’intestin irritable qui consistent à limiter les glucides fermentescibles/FODMAP et à trouver les bonnes familles de fibres qui conviennent à votre confort (1)(2)(4)(7)(9). On veut « affamer » le surplus de bactéries tout en s’assurant de ne pas nuire à la qualité globale de votre microbiote intestinal (9).

Une nutritionniste de l’équipe pourra vous aider à établir le meilleur plan de match pour vous : quantité et qualité de glucides, espacement optimal entre les repas, hydratation, validation d’autres intolérances ou sensibilités alimentaires, essai d’un probiotique, utilisation de suppléments alimentaires s’il y a lieu et autres approches (2)(4)(5)(8). Elle pourra également vous guider dans le processus avec votre médecin traitant ou médecin spécialiste au besoin.

N’hésitez pas à écrire pour plus de détails

Une formation médicale sur le sujet est aussi disponible; n’hésitez pas à vous informer!

Références

(1) FODMAPs and Irritable Bowel Syndrome (2019) Monash University https://www.monashfodmap.com/about-fodmap-and-ibs/

(2) Knez E, Kadac-Czapska K, Grembecka M. The importance of food quality, gut motility, and microbiome in SIBO development and treatment. Nutrition. 2024 Apr 5;124:112464. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/38657418/

(3) Lim J, Rezaie A. Pros and Cons of Breath Testing for Small Intestinal Bacterial Overgrowth and Intestinal Methanogen Overgrowth. Gastroenterol Hepatol (NY). 2023 Mar;19( 3 ):140-146. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37706108/

(4) Pimentel M, Saad RJ, Long MD, Rao SSC. ACG Clinical Guideline: Small Intestinal Bacterial Overgrowth. Am J Gastroenterol. 2020 Feb;115( 2 ):165-178. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32023228/

(5) Pimentel M, Rezaie A. (2022) The microbiome connection Your guide to IBS, SIBO and low-fermentation eating.

(6) Rao SSC, Bhagatwala J. Small Intestinal Bacterial Overgrowth: Clinical Features and Therapeutic Management. Clin Transl Gastroenterol. 2019 Oct;10(10):e00078. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31584459/

(7) Redondo-Cuevas L, Belloch L, Martín-Carbonell V, Nicolás A et al. Do Herbal Supplements and Probiotics Complement Antibiotics and Diet in the Management of SIBO? A Randomized Clinical Trial. Nutrients. 2024 Apr 7;16( 7 ):1083. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/38613116/

(8) Scarlata K. (2022) Small Intestinal Bacterial Overgrowth Update + Overview: Treatments, Testing and Current Approaches to Managing Symptoms.

(9) Scarlata K. (2021) SIBO : Practical nutrition intervention and clinical pearls. Dietitian Depp Dive.

(10) Scarlata K. (2021) SIBO Primer: What it is + How to treat et SIBO: Practical nutrition intervention and clinical pearls. Dietitian Depp Dive.

(11) Zafar H, Jimenez B, Schneider A. Small intestinal bacterial overgrowth: current update. Curr Opin Gastroenterol. 2023 Nov 1;39( 6 ):522-528. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37751393/

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