Pour fin de lecture, les chiffres entre parenthèses réfèrent aux numéros des références annexées au présent document.

Vous avez raison de vous méfier de certains mots qui nous paraissent incompréhensibles à la lecture des ingrédients d’un produit transformé. Plusieurs additifs alimentaires sont sans danger pour la santé et sont de source naturelle. On pense aux vitamines C et E, au sodium, à la curcumine par exemple. Rehausser la saveur, le goût, la couleur, permettre une meilleure conservation, il ne faut pas pointer du doigt toutes ces substances ajoutées par l’industrie. Certaines ont toutefois des effets négatifs sur la santé digestive et le microbiote intestinal, des effets qui peuvent induire une inflammation locale, médiatrice de problèmes cardio-métaboliques (maladies cardio-vasculaires, diabète de type 2, obésité, stéatose hépatique, etc.) (1).

Tout d’abord, Santé Canada définit un additif alimentaire comme étant « toute substance chimique ajoutée à un aliment lors de la préparation ou avant l’entreposage, et qui s’intègre à celui-ci ou en modifie les caractéristiques pour l’obtention de l’effet technique désiré. Ou encore, elle peut être ajoutée aux aliments pour en conserver la valeur nutritive, en augmenter la durée de conservation ou en rehausser l’apparence, pour en faciliter la transformation, l’emballage ou l’entreposage ». (2)

L’industrie est friande de ces additifs alimentaires et bien que Santé Canada soit l’instance qui en assure la réglementation, nous ignorons si les doses permises ont été validées pour tous les problèmes de santé. À titre d’exemple, la quantité permise de certains émulsifiants a été basée sur des études sur le cancer, mais ne tient pas compte de leurs impacts sur la couche de mucus qui protège la barrière intestinale. On ignore également l’effet cumulatif de plusieurs doses jugées acceptables, consommées dans une même journée, pendant plusieurs semaines et années.

Plus de détails sur les doses acceptables

À ce jour, 400 additifs sont autorisés.

L’innocuité des additifs alimentaires est réglementée par un processus ayant diverses étapes, où on en vient à déterminer la dose inopérante d’un additif, c’est-à-dire la dose pour laquelle on n’a remarqué aucun effet négatif « perceptible » au sein des études animales.

Cette dose inopérante est par la suite divisée par cent pour obtenir la dose journalière admissible chez l’humain. C’est ce qui précise à l’industrie, les directives pour une consommation quotidienne au long cours sans répercussion négative pour la santé.

À noter que l’on parle ici d’UN additif. Sachant que l’on consomme plusieurs aliments par jour, il faut prendre en compte la somme des additifs et les interactions potentielles entre eux. Aucune donnée scientifique n’a permis d’établir de façon claire les répercussions d’une consommation accumulée de plusieurs additifs de façon simultanée.

Les impacts sur le système digestif

Les additifs épaississants, gélifiants et stabilisants et, les émulsifiants

La cellulose, l’agar-agar, toutes les gommes (gomme de xanthane, de guar, de caroube), les polysorbates, la carraghénine, la pectine agissent directement sur la texture de l’aliment.

→ La cellulose se retrouve couramment sous forme de méthylcellulose ou de gomme de cellulose (carboxymethylcellulose) comme agent de remplissage dans les produits glacés, pour épaissir divers produits ou pour agir à titre d’agent anti-agglomérant pour les fromages râpés. Comme la cellulose est une fibre insoluble et non digeste, elle peut entraîner de la constipation, de la diarrhée et des ballonnements. (4) (5) (6)

→ L’agar-agar, aussi reconnue comme la « gélatine végétale » par excellence, est inoffensive, quoique à forte dose, elle provoque des inconforts digestifs allant des ballonnements à la diarrhée. (4) (7)

→ Les polysorbates sont couramment utilisés à titre d’émulsifiant, notamment dans les sauces, condiments, crèmes, fromages, margarines et plats préparés. Ils pourraient potentiellement modifier négativement le microbiote intestinal et par le fait même, favoriser le développement des maladies inflammatoires de l’intestin (MII). (4)

→ Des études ont également démontré que la carboxyméthylcellulose et les polysorbates pouvaient directement diminuer la couche de mucus servant de protection à la barrière intestinale et ainsi, contribuer à l’installation graduelle d’une inflammation locale au sein de la lumière intestinale. (9)

→ Les pectines sont généralement extraites des fruits. Elles sont couramment utilisées pour épaissir les confitures et tartinades. On parle ici de fibres solubles favorables à la satiété et à la santé métabolique. Toutefois, dans certains contextes de troubles intestinaux, leur fermentation par les bactéries intestinales peut causer des gaz, ballonnements et inconforts intestinaux. (5) (6) Il faut adapter notre consommation aux symptômes ressentis et à la condition de santé en cours.

→ La carraghénine, agent épaississant très commun provenant d’une algue rouge, fait preuve de controverse, étant soupçonnée d’être à l’origine des maladies inflammatoires. En effet, la forme dégradée de ce polysaccharide serait susceptible de créer des lésions à la barrière intestinale et donc, pourrait plus facilement la traverser. (4) (8) (9) Des lésions à la barrière implique une perméabilité intestinale corrélée à certains troubles métaboliques qui origine d’une inflammation intestinale. Pour aller plus loin sur les notions de perméabilité intestinale, vous référer à l’article « Perméabilité ou « leaky gut », ce qu’il importe de savoir! »

Les agents de remplissage

La maltodextrine est de plus en plus populaire puisqu’elle est catégorisée comme étant une « nouvelle fibre », mais il s’agit d’un produit qui contient des glucides et des calories. Au goût légèrement sucré, on l’utilise donc pour remplacer une partie du sucre dans les produits alimentaires, ce qui permet aux compagnies d’augmenter le nombre de grammes de fibres de leurs produits sans toutefois diminuer leur goût sucré.

En présence de maltodextrine, les bactéries intestinales produisent moins d’acides gras à chaîne courte (AGCC) bénéfiques, dont l’acide acétique, un composé qui maintient un niveau intestinal adéquat d’acidité limitant ainsi l’invasion des agents pathogènes. (9) On voit également une diminution de l’acide propionique. Cet AGCC joue un rôle anti-inflammatoire important dans la prévention des maladies inflammatoires de l’intestin tout en augmentant le nombre de bactéries favorables telles que les Bifidobactéries. (9) (10) (11)

En somme, ce nouvel agent sucrant a comme conséquence la réduction de molécules qui occupent une place centrale dans le maintien de l’imperméabilité de la membrane intestinale et dans la composition du microbiote intestinal. (9) (11)

 

L’inuline

L’inuline est une fibre soluble extraite de la racine de chicorée. Elle est utilisée dans divers produits alimentaires pour venir bonifier l’apport en fibres du produit. Intéressant à première vue, puisqu’elle agit comme prébiotique, nourriture permettant aux bactéries bénéfiques de croitre et de produire des métabolites anti-inflammatoires.

Faisant toutefois partie de la grande famille des glucides fermentescibles contenant des FODMAP, sa consommation, même en petite quantité, peut être source de gaz et de forts inconforts intestinaux pour une certaine partie de la population, les personnes dites intolérantes aux FODMAP. (5) (6)

Les édulcorants

Les édulcorants sont très populaires étant donné leur goût sucré de plus d’une centaine de fois plus élevé que le sucre de table (sucrose) tout en augmentant aucunement ou presque, l’apport calorique. (12)

Les plus communs sont le sucralose, le stévia, l’aspartame, l’acésulfame K et la saccharine.

À ce jour, leur consommation au sein de l’alimentation est considérée comme sécuritaire. Le nombre d’études chez les humains étant limité, aucune preuve ne permet d’énoncer que les édulcorants affecteraient la santé intestinale pour des doses d’utilisation humaine.

La majorité des études actuelles ont été faites sur des animaux et à des doses largement supérieures à ce qui est consommé chez un humain. (12) Les hypothèses voulant que les édulcorants non nutritifs viendraient créer une perturbation de la flore intestinale sont encore très controversées, mais il ne fait aucun doute que les recherches doivent se poursuivre considérant les impacts des grandes doses sur le modèle animal et que la littérature scientifique sera éventuellement plus consensuelle en ce qui concerne leurs effets à long terme.

Certaines personnes témoignent toutefois de l’effet laxatif du sucralose lorsque consommé à plus forte dose. (12) Dans la même lignée, on retrouve les polyalcools (sucre-alcool): sorbitol, xylitol, erythritol, mannitol. On les retrouve dans plusieurs produits allégés, faibles en glucides ou encore, dans les gommes pour leur effet anti-carie.

Ils sont à éviter pour la vaste majorité des personnes souffrants de problèmes digestifs, car leur consommation est fortement corrélée à des inconforts digestifs tels que les gaz, les flatulences et la diarrhée.

Si ces symptômes affectent votre quotidien et que vous souhaitez être accompagné en ce sens, prenez rendez-vous avec une nutritionniste de notre clinique.

En conclusion, rappelons que certains additifs jouent un noble rôle au sein des produits offerts à l’épicerie. Ils permettent notamment de préserver les qualités nutritionnelles et de prolonger la durée de conservation des aliments et donc, de réduire le gaspillage alimentaire.

Considérant toutefois les nombreux impacts négatifs de certains d’entre eux sur la santé intestinale, il serait important de prioriser le plus possible les aliments non transformés et frais et de cuisiner nous-mêmes nos repas et collations. La lecture de la liste des ingrédients est notre meilleur outil de travail pour s’assurer de limiter l’exposition récurrente à ces additifs.

En résumé, ces molécules sont nombreuses et encore à ce jour, plusieurs petites nouvelles percent le marché alimentaire. Il est facile de s’y perdre et de baisser la garde. Comme le veut le dicton, « la modération a bien meilleur goût » et par conséquent, mieux vaut y aller de prudence!

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Références :

(1) Chassaing et al. (2022) Randomized Controlled-Feeding Study of Dietary Emulsifier Carboxymethylcellulose Reveals Detrimental Impacts on the Gut Microbiota and Metabolome. Gastroenterology Mar;162(3):743-756. Chen et al. (2021) Role and Mechanism of Gut Microbiota in Human Disease. Front Cell Infect Microbiol Mar 17;11:625913.
(2) https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/aliments-nutrition/salubrite-aliments/additifs-alimentaires/listes-autorises.html
(3) https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/aliments-nutrition/rapports-publications/politique-differenciation-additifs-alimentaires-agents-technologiques-2008.html
(4) Chancerelle, R. (2019). Le nouveau guide de poche des additifs. Édition Poche Leducs. Paris (France).
(5) O’Grady J, O’Connor EM, Shanahan F. Review article: dietary fibre in the era of microbiome science. Aliment Pharmacol Ther. 2019; 49:506–515. https://doi.org/10.1111/apt.15129.
(6) https://www.jandonline.org/article/S2212-2672(16)31187-X/fulltext#back-bib123
(7) https://www.quechoisir.org/comparatif-additifs-alimentaires-n56877/e406-agar-agar-p223609/
(8) https://www.quechoisir.org/comparatif-additifs-alimentaires-n56877/e407a-carraghenane-semi-raffine-algue-eucheuma-transformee-pes-p223617/
(9) Gerasimidis, K., Bryden, K., Chen, X., Papachristou, E., Verney, A., Roig, M., Hansen, R., Nichols, B., Papadopoulou, R., & Parrett, A. (2020). The impact of food additives, artificial sweeteners and domestic hygiene products on the human gut microbiome and its fibre fermentation capacity. European journal of nutrition, 59(7), 3213–3230.
(10) Zangara, M. T., Ponti, A. K., Miller, N. D., Engelhart, M. J., Ahern, P. P., Sangwan, N., & McDonald, C. (2022). Maltodextrin Consumption Impairs the Intestinal Mucus Barrier and Accelerates Colitis Through Direct Actions on the Epithelium. Frontiers in immunology, 13, 841188. https://doi.org/10.3389/fimmu.2022.841188
(11) https://www.biolineaires.com/les-bacteries-propioniques-leur-role-essentiel-sur-la-muqueuse-intestinale/
(12) Ruiz-Ojeda, F. J., Plaza-Díaz, J., Sáez-Lara, M. J., & Gil, A. (2019). Effects of Sweeteners on the Gut Microbiota: A Review of Experimental Studies and Clinical Trials. Advances in nutrition (Bethesda, Md.), 10(suppl_1), S31–S48. https://doi.org/10.1093/advances/nmy037
(13) https://www.quechoisir.org/comparatif-additifs-alimentaires-n56877/e385-edta-calcio-disodique-ethylene-diamine-tetra-acetate-calcio-disodique-p223577/
(14) https://www.quechoisir.org/comparatif-additifs-alimentaires-n56877/e320-butylhydroxyanisol-bha-p223461/
(15) https://www.quechoisir.org/comparatif-additifs-alimentaires-n56877/e321-butylhydroxytoluene-bht-p223465

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